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La végétalisation des bâtiments au service des villes

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Rédigé par Dominic Lavoie

               La présence des îlots de chaleur représente un phénomène de plus en plus préoccupant pour les villes. Ils sont le résultat de divers phénomènes climatiques causés par les milieux bâtis denses. Avec la constante mise en place de mesures pour limiter l’étalement urbain, les villes se densifient et ainsi modifient l’environnement physique en y implantant de nouveaux bâtiments : « bien que le climat dans les villes ne joue pas un rôle majeur dans l’évolution climatique de la Terre, il agit tout de même sur la plupart des gens vivant ou travaillant dans les agglomérations. » (Institut de géographie, 2008 : 1) Alors, ce compte rendu tient compte de la réduction des îlots de chaleur et des polluants et, par ricochet de leur influence sur l’amélioration de la qualité des milieux de vie collectifs. La végétalisation des bâtiments apparaît comme un facteur concluant pour contribuer à cette réduction. (Bernier, 2011a, Dunnett et Kingsbury, 2008, Institut de géographie, 2008) Plusieurs éléments conduisent à prouver les bienfaits que peut procurer la végétalisation des bâtiments dans les milieux urbains. Faisant l’objet de ce compte-rendu, ces bienfaits se divisent en deux groupes, soit les bénéfices écologiques ainsi que les bénéfices socioécologiques. Ceux-ci seront principalement traités sous l’angle des toitures et des murs végétaux.

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Bénéfices écologiques de la végétalisation

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               Dans un premier temps, la végétalisation des bâtiments apporte de nombreux bénéfices écologiques pour les milieux urbains. D’abord, il est possible de noter que la végétation aide à améliorer la qualité de l’air des villes. L’environnement contient une grande quantité de gaz à effet de serre provenant principalement de l’utilisation de l’automobile (Dunnett et Kingsbury, 2008 : 68) Or, la présence des plantes permet de réduire ces gaz puisqu’elles les utilisent lors de leur processus de photosynthèse, c’est-à-dire que les plantes absorbent le dioxyde de carbone contenu dans l’air ainsi que l’eau et les nutriments qui sont dans le sol pour les transformer en oxygène. Évidemment : « les plantes produisent de l’oxygène durant le jour. La nuit, le processus s’inverse […] et libère du dioxyde de carbone. Il y a malgré cela une balance positive nette quant à la production d’oxygène. » (Baskaran, cité par Bernier, 2011a : 52) D’ailleurs, il est essentiel de réduire les polluants de l’air puisque, par leur composition, les îlots de chaleurs piègent ou dispersent dans l’environnement urbain les polluants. En fait, les îlots de chaleur se traduisent sous la forme d’un dôme chaud (voir fig. 1), qui est produit par un mouvement ascendant de l’air, recouvrant tout le milieu urbain. (Institut de géographie, 2008 : 4)

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​              Par contre, il est important de mentionner que pour réduire de manière considérable ou perceptible, les polluants de la ville, il est nécessaire de végétaliser un grand nombre de bâtiments, puisqu’une végétalisation réalisée de manière isolée n’aura pas l’impact recherché. De plus, le type de végétaux qui est implanté représente une préoccupation importante. Il est donc conseillé d’utiliser des végétaux sempervirents, c’est-à-dire des végétaux qui conservent leur feuillage toute l’année ainsi leur action s’effectuera sur une plus grande période. (Bernier, 2011a : 52 et Dunnett et Kingsbury, 2008 : 68) Les bienfaits s’étendent aussi jusque sur les façades; les murs végétaux peuvent aider à absorber divers types de particules volatiles contenues dans l’air : « les plantes pourraient donc également absorber ce genre de polluants en milieu urbain, à l’air libre, mais dans des espaces assez resserrés, comme les rues des villes. » (Dunnett et Kingsbury, 2008 : 203) Bref, l'implantation ainsi que le type de toitures et de murs végétaux peuvent grandement contribuer à l’amélioration des conditions d’air pour les citoyens des villes.

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​               Par la suite, la végétalisation des bâtiments permet la régularisation des températures. La ville compte de plus en plus de constructions accroissant ainsi de nombreux problèmes urbains. Les auteurs sont clairs et unanimes sur la question, les milieux urbains sont caractérisés par des températures toujours plus élevées, une humidité de l’air importante, une faible circulation d’air, un niveau assez élevé de polluants contenu dans l’atmosphère et bien plus encore. (Bernier, 2011a : 53 et Dunnett et Kingsbury, 2008 : 69-70) De plus, l’institut de géographie note que : « l’albédo (= quantité d’énergie solaire réfléchie en direction de l’espace) est en moyenne un peu plus faible en ville qu’en campagne, sauf pour les bâtiments clairs. Par conséquent, une plus grande quantité d’énergie solaire va réchauffer la surface du sol, puis l’air ambiant en ville. » (Institut de géographie, 2008 : 3) Alors, les toitures végétales tout comme les murs végétaux représentent des potentiels pour atténuer tous ces problèmes qui engendrent des îlots de chaleur dans les milieux urbains. Quant à eux, les toitures vertes ont des répercussions sur les îlots de chaleur à la surface, il restreint le mouvement vertical de l’air tandis que les murs verts ont des impacts sur les îlots de chaleurs atmosphériques en bloquant le mouvement d’air contre le bâtiment restreignant donc le réchauffement des températures. (Bernier, 2011a : 54-55) D’ailleurs, l’institut de géographie mentionne aussi que, tout en permettant de réduire efficacement les températures, les toitures végétalisées ne demandent pas des efforts d’aménagement considérables et habituellement elles sont plus simples à effectuer que l’aménagement de parcs verdoyants où la place manque souvent dans les villes. (Institut de géographie, 2008 : 6) L’effet majeur de ces surfaces vertes est qu’elles représentent de grands potentiels de rafraîchissement, et ce, grâce à leur caractéristique d’évapotranspiration. Cela se traduit par le fait que les végétaux relâchent de la vapeur d’eau dans l’atmosphère : « il en résulte que cette énergie reste confinée dans la vapeur d’eau et ne peut donc pas être convertie en énergie qui chauffera les surfaces. » (Bass, cité par Dunnett et Kingsbury, 2008 : 71-72). Pour avoir un réel effet, il suffit que 6 % des surfaces de toits disponibles dans un milieu urbain soit recouverte de végétaux pour permettre de réduire les températures urbaines de 1 à 2 °C. (Landreville, cité par Bernier, 2011a : 56) Par contre, cet effet de fraîcheur ne peut s’étendre que sur un rayon de 300 mètres des sources de végétaux, ce qui démontre l’importance de l’implantation à grande échelle dans la ville afin de réduire de manière significative les températures élevées créées par les îlots de chaleur. (Scherer, cité par Institut de géographie, 2008 : 7)

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               Toutefois, il est important de mentionner que ces deux bénéfices écologiques de la végétalisation des bâtiments ne sont pas les seuls bienfaits pour les milieux de vie des villes. D’ailleurs, les toitures végétales ainsi que les murs verts sur les bâtiments peuvent aussi engendrer une meilleure gestion des eaux pluviales ainsi qu’offrir des environnements propices à la biodiversité. Puis, ceux-ci aident à améliorer l’espace urbain sur le plan de la pollution sonore. (Dunnett et Kingsbury, 2008)

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Bénéfices socioécologiques de la végétalisation

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​              Dans la précédente partie, de nombreux bienfaits sur le plan écologiques ont été abordés pour expliquer l’effet que peut apporter la végétalisation des bâtiments sur le climat des villes. Quant à elle, la prochaine section traitera davantage des bénéfices humains qui agissent sur l’amélioration de la qualité de vie des citoyens. À première vue, l’aspect initial à aborder est celui de l’esthétique. Bernier (2011a : 49) recense dans son mémoire un propos de Ian McHarg : « s’inspirer de la nature et combiner art et science est un moyen de créer efficace. » Puis, on mentionne aussi le fait que les gens ont certains besoins donc celui d’être stimulé par la présence de la nature dans leur vie, même s’ils sont dans un milieu urbain dense, car ceux-ci sont constamment entourés de briques et d’asphalte. Donc la présence de végétalisation sur les bâtiments permet d’améliorer la qualité visuelle d’un environnement. (McLennan, cité par Bernier, 2011a : 65-67). D’ailleurs, dans les environnements urbains actuels, certains éléments sont délaissés d’un point de vue architectural. Les toits représentent souvent des constructions comportant peu d’attraits. Lorsque l’on est situé dans des bâtiments de plus grande hauteur, les visions des toitures monotones et sans vie, situées en contrebas, peuvent paraître désolantes pour les citoyens. Alors, si on considère le fait que les toits participent fortement à améliorer l’image d’un immeuble, ils peuvent aussi contribuer à celle de la ville. (Dunnett et Kingsbury, 2008 : 84 et 90) Comme certains auteurs l’expliquent : « les toits verts offrent à l’œil humain une continuité des zones vertes en milieu urbain. » (Dunnett et Kingsbury, 2008 : 51) Comparativement aux toits verts, les murs végétalisés ont, quant à eux, une ligne d’avance pour le côté esthétique des villes. Ils ont l’avantage d’être visibles les gens qui sont au sol. Ils contribuent plus facilement que les toits à l’amélioration de la qualité de vie dans villes. (Bernier, 2011a : 66) Finalement, on dénote que des vues sur des toitures ou murs verts apportent des bénéfices au niveau de la santé des citoyens. En effet, les plantes ont un aspect thérapeutique sur les gens. Ils aident pour : « la réduction du stress, la baisse de l’hypertension, la détente musculaire et une augmentation des émotions positives. » (Ulrich et Simons, cité par Dunnett et Kingsbury, 2008 : 92) Bref, lorsqu’on améliore l’esthétique des environnements et qu’on offre des vues sur un toit vert ou sur un mur végétal, on participe à la création d’un habitat pour les humains, c’est-à-dire qu’on intègre des principes pour que les humains aient un contrôle de leur confort. (McLennan, cité par Bernier, 2011a : 67)

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               Le second aspect important à traiter quant à l’amélioration du cadre de vie des citoyens est celui de l’agrément. On note que les toitures représentent des espaces qui ne sont pas suffisamment exploités dans les zones urbaines. Ces espaces peuvent jouer un rôle structurant pour différents types d’activités dans une ville. (Dunnett et Kingsbury, 2008 : 85) Or, ceux-ci : « peuvent devenir des lieux de rencontre et des zones récréatives qui augmentent l’interaction et la cohésion sociale » (Green Roofs and Healthy Cities, cité par Bernier, 2011a : 70) Comme l’explique Dunnett et Kingsbury (2008 : 86-87), voyant le manque d’espace vert, la ville de Geislingen en Allemagne, a implanté sur le toit d’un nouveau centre commercial, un parc public pour les citoyens. Au cÅ“ur de ce parc, on y retrouve diverses installations telles des jeux pour les enfants, des chemins de circulation pour se promener et un city-stade (voir fig. 2)

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               Donc, lorsqu’un propriétaire fait une intervention de ce genre sur son bâtiment il transmet un message clair à l’environnement et à la société. (Trottier, cité par Bernier, 2011a : 70) Bernier explique en exprimant les propos de Landreville (2011a : 70) que cela crée : « un sentiment de fierté et un lien entre les citoyens peuvent se développer dans une ville qui affiche ses préoccupations environnementales par des mesures incitatives à la végétalisation des constructions. »


               Évidemment, tout comme les bénéfices écologiques, de nombreux autres aspects pourraient être traités. En effet, la végétalisation des bâtiments peut apporter des avantages curatifs, économiques ou liés à la biophilie.

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Étude de cas

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​               La ville de Paris est utilisée à titre de cas d’étude afin de bien comprendre tout le potentiel que comporte le verdissement des bâtiments dans un milieu urbain dense. La ville essaie de plus en plus d’intégrer des mesures pour offrir un environnement plus sain. Elle tente d’ailleurs d’ajouter le coefficient de biotope (offrir des environnements stables pour différentes espèces végétales et animales) pour développer la végétation d’un point de vue de la biodiversité. (Atelier parisien d’urbanisme, 2004 : 1) D’un autre point de vue, un bon exemple pour l’écologie à Paris est la cheminée EPAD située dans le quartier de la Défense. (voir fig. 3-4)

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               Il s’agit d’une cheminée de ventilation pour des circulations souterraines. Le projet vise donc à redécouvrir la végétation, sur cette cheminée, selon un principe de jardin vertical. (Maison Édouard François) Bien que de petite échelle, le projet montre clairement un type d’actions posées sur le plan environnemental : « Il s’agit d’une cheminée de ventilation plantée d’ipomée. La capacité de filtrer les particules et de capter les polluants est exploitée au grand jour dans ce concept insolite. » (Bernier, 2011b : 79) La végétation de cette cheminée permet d’embellir l’esthétique pour les gens qui fréquentent le secteur. En plus de tout cela, de nombreux bâtiments neufs font face à cette installation. (Maison Édouard François)

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               Puis, la ville de Paris a une grande ambition d’embellissement de son milieu urbain. Un peu moins présente dans les écrits que les toitures vertes, les murs végétaux se multiplient de plus en plus à Paris. Comme la Marie de Paris le mentionne, les murs végétaux permettent d’agrémenter les coins aveugles et peu attrayants qui sont créés par la composition des façades parisienne. Cela permet aussi de rendre ces espaces qui sont plus en retrait beaucoup plus propres. Ils deviennent même, par endroits, des éléments unificateurs du tissu urbain de la ville. (Marie de Paris, 2012) Bien qu’ils puissent revêtir différentes formes sur les façades, la végétation implantée sur les murs des bâtiments de Paris est standardisée pour y intégrer des plantes en abondances. (Bernier, 2011b : 79). Évidemment, bien des exemples de végétalisation des bâtiments pourraient être explorés pour leur apport au milieu urbain de Paris. On peut par exemple noter la célèbre façade du musée du quai Branly. (Voir fig. 5)

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              Pour sa part, Bernier (Michigan, cité par Bernier, 2011b : 81) fait mention dans son mémoire du cas de la façade du BVH Homme qui : « suscite unanimement l’enthousiasme des passants, des habitants du quartier, des élus de l’arrondissement et des architectes des bâtiments de France. » L’objectif clair de cette façade, celle d’améliorer la qualité de l’espace. (voir fig. 6-7) Le projet a permis d’améliorer l’apparence visuelle dans la ville en cachant la structure de béton existante du bâtiment. (Bernier, 2011b : 81)

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Conclusion

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​               ​En somme, les avantages que procure la végétalisation des bâtiments sont diversifiés. Il devient donc difficile de les présenter de manières concises. Par contre, cela permet de voir que leurs avantages sont si grands qu’ils peuvent réellement jouer un rôle dans les milieux urbains. (Bernier, 2011a : 72) C’est pourquoi il est possible d’énoncer que la végétalisation des bâtiments apparaît comme facteur bénéfique pour l’amélioration du cadre de vie dans les villes. Les auteurs affirment que l’intégration de la végétation sur les bâtiments apporte de nombreux avantages écologiques qui permettent de réduire les îlots de chaleur et les polluants contenus dans les milieux urbains denses. Puis, des constats ont été faits par rapport aux bénéfices humains qu’apporte le verdissement des bâtiments. Les espaces souvent délaissés sur le toit des bâtiments peuvent devenir des environnements stimulants pour différents types d’activités. Tandis que les murs végétalisés peuvent améliorer le cadre visuel des villes. Par ces interventions les bâtiments s’intègrent aux paysages, ainsi ils peuvent réellement contribuer à l’épanouissement des milieux urbains. Il ne reste plus qu’à étendre ces conceptions sur un plus grand nombre de bâtiments afin qu’ils aient des impacts concrets sur les changements climatiques.

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Bibliographie:

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Mémoire de maîtrise:

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BERNIER, A. (2011a) « Bénéfices de la végétalisation du bâtiment en milieu urbain ». In Végétalisation du bâtiment en milieu urbain – bénéfices et perspectives. Mémoire de Maîtrise. Montréal : Université du Québec à Montréal, p.49-73.


BERNIER, A. (2011b) « Végétation du bâtiment en milieu urbain : Paris, ville témoin ». In Végétalisation du bâtiment en milieu urbain – bénéfices et perspectives. Mémoire de Maîtrise. Montréal : Université du Québec à Montréal, p.74-86.

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Monographie:

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DUNNETT, N., KINGSBURY, N. (2008) « Pourquoi des toits végétalisés? ». In Toits et murs végétaux. Rodez : Éditions du Rouergue, p.47-96.

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Périodique:

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​Institut de géographie (2008) « Ville et climat ». Vues sur la ville, Université de Lausanne, no 21, novembre, 8 p.


Atelier parisien d’urbanisme (2004) « Développer le végétal à Paris : les nouvelles règles du Plan local d’urbanisme de Paris ». APUR, no 13, octobre : 4 p. [En ligne], http://www.apur.org/sites/default/files/documents/4P13.pdf (Page consultée le 24 novembre 2012)

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​Site internet:

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Mairie de Paris. Les jardins verticaux, une solution pour embellir la ville. 2012. [En ligne], http://www.paris.fr/loisirs/paris-au-vert/jardinage-vegetation/la-vegetalisation-verticale/rub_8335_stand_35624_port_19343 (Page consultée le 24 novembre 2012)


Maison Édouard François. Ventilation Chimney. [en ligne], http://www.edouardfrancois.com/en/all-projects/equipments-retail-installations/details/article/58/cheminee-de-ventilation/ (page consulté le 24 novembre 2012)

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Thüring, C. Vertical gardens in Paris, July 2009. (2009) [En ligne], http://www.greenroofs.com/content/christinesramblings001.htm (Page consultée le 24 novembre 2012)

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